Dans la ruePolice/Justice

Ode au Cacatov « En 3 mois, ils avaient reçu des pavés, des cocktails molotov, mais jamais ils n'avaient été souillés. »

En 3 mois, ils avaient reçu des pavés, des cocktails molotov, mais jamais ils n’avaient été souillés. Hier, au cours de la manifestation des gilets jaunes au centre-ville, trois policiers de la Bac Nord ont été atteints par des sacs remplis d’excréments.La Provence, 3 Mars 2019

La nouvelle nous était venue du Venezuela. Des manifestants utilisent là-bas une arme nouvelle et inédite contre les policiers. Une arme d’une simplicité évidente mais à l’efficacité pourtant redoutable. Une arme comme seuls les révoltés écrasés par la violence d’État savent en inventer. Une arme mineure. Presque une mauvaise blague potache. Une bombe à merde, une bombe faite de caca. La recette est encore plus simple que celle du cocktail Molotov que les finlandais avaient utilisé contre les chars d’assaut russe. Prenez de la merde. Pas là votre. ADN oblige. Mettez-la dans un récipient hermétique cassable. Ballon de baudruche ou pot de confiture en verre. Mélangez la avec de l’eau. Balancez la sur la police. Il semblerait que depuis 2 actes au moins les gilets jaunes se soient ré-appropriés cette arme. C’est de bonne guerre. Cette guerre dissymétrique qui opposera toujours le bricolage offensif à la violence technologique, industrielle et chirurgicale des gouvernements. Voilà des semaines maintenant que nous nous faisons écraser avec des armes produites industriellement, élaborées par des ingénieurs et fabriquées dans des usines dont le business repose sur l’extension universelle de la mutilation d’État. Des armes chimiques, des grenades explosives, des armes de guerre. Des armes majeures. Une économie. Des appels d’offres. Des commandes. Des ordres. Un usage décomplexé de ces armes. Une stratégie de la Terreur. Des mutilations en cascade. Au nom du maintien de l’ordre. Du côté des manifestants, il fallait une réponse à la hauteur de la situation. Comment mieux dire à la police tout le mépris qu’elle nous inspire ? Comment mieux lui balancer à la gueule la vérité de sa fonction ? Comment faire naître une peur qui n’est pas celle de la mutilation mais celle de ce liquide nauséabond souillant vos vêtement ou s’insinuant dans votre corps par l’intermédiaire de votre bouche ou de vos yeux ? Comment frapper le corps du policier de la honte de cette odeur pendant tout le reste de son service jusqu’à son fourgon et sa caserne ou son commissariat ? Comment mieux lui dire tout le bien que l’on pense de lui ? Une arme organique et artisanale à la fois. Résultat d’un processus de mastication, de digestion et de défécation. De bidouillage attentif à ne pas laisser des traces ADN mais à récupérer pourtant cette précieuse matière à conditionner précautionneusement. L’efficacité de cette arme ne repose pas sur la destruction des corps, l’écrasement des tissus,l’éclatement des organes. Elle repose sur l’humiliation infligée à celui qui la subit. Elle ne peut blesser que l’orgueil. Et c’est déjà beaucoup et à la fois bien assez. Déclarons notre flamme inconditionnelle à ce mélange de vengeance et d’excréments. Que notre colère se mêle à cette merde réelle pour exposer à la face du monde ce que nous pensons de la merde qui nous fait face. Que mille cacatov s’élancent dans les airs pour s’écraser sur le bouclier de ceux qui nous tiennent en respect. Le fruit de nos entrailles est béni.