🔥UNE CATASTROPHE NOMMÉE AUSTRALIE - À PROPOS DES ANIMAUX, DES ABORIGÈNES ET DE LA COLONISATION - OU COMMENT UNE CATASTROPHE PEUT EN CACHER UNE AUTRE ?
Presque tout le monde a compris, à part quelques rares climatosceptiques dont le premier ministre australien, que les incendies qui frappent l’Australie sont un effet direct du réchauffement climatique et donc plus largement de notre civilisation industrielle, marchande et capitaliste. Ce sont des pics de chaleur record qui expliquent la facilité avec laquelle l’Australie s’embrase.
Tout le monde sent plus ou moins confusément qu’il y a là comme un avant-goût de la catastrophe plus générale qui s’annonce. Mais il y a quelque chose de tristement ironique dans le fait que ce soit l’Australie qui soit si durement frappée par la folie occidentale. D’abord parce que géographiquement l’Australie n’est pas l’Europe. Elle est située à plus de 15000 km de Paris. Pourtant il s’agit bien d’un pays occidental et ce sont bien des descendants d’Européens que nous voyons continûment sur les chaînes de télévision. Si nous voyons tant de têtes blondes parmi les victimes des incendies c’est que au cours du 19e siècle la population aborigène d’Australie a été décimée. L’Australie reste le plus sauvage laboratoire de cette colonisation par laquelle selon le mot de Darwin » les races civilisées de l’homme extermineront et remplaceront les races sauvages partout dans le monde ». L’Australie était alors considérée comme une terra nullius c’est-à-dire une terre qui n’appartient à personne. Voilà qui suffisait pour justifier l’invasion de l’Australie par les Britanniques au 19e siècle.
L’Australie reste à jamais le nom de cette catastrophe là. Un ethnocide. Non pas la disparition totale des aborigènes mais la destruction d’une culture indigène. Nouvelle ironie. Cette culture, ce monde, appartient à tous les mondes disparus auquels s’est attaquée la domination occidentale et qui auraient pu nous permettre d’échapper au triste destin qu’elle nous promet précisément parce qu’ils reposaient sur un autre rapport au monde, aux vivants et aux esprits.
“Si nous n’avions pas tué des tas d’Aborigènes et que nous avions appris leur sagesse en matière de gestion de la brousse, nous n’aurions peut-être pas eu un moment aussi terrible que maintenant.”
Où sont les aborigènes ? Comment se fait-il que parmi toutes les personnes interrogées sur les chaînes de télévision australienne, il n’y en ait aucun ? Pourquoi ne leur donne-t-on pas la parole ? Comment sont-ils frappés par la catastrophe actuelle ? Qu’ont-ils à dire sur cette nouvelle catastrophe qui s’abat sur eux ? On ne le saura pas. Les aborigènes constituent l’impensé, le refoulé des incendies australiens.
On nous parle par contre du drame absolu que constitue ces incendies pour la faune australienne. Plus de 500 millions d’animaux tués. Mais là aussi l’essentiel semble ignoré. Il s’étale pourtant sur de nombreuses photos ou vidéos (cf. lien). On y voit des animaux morts, brûlés ou asphyxiés, empalés sur des barbelés qui sont venus stopper leur fuite. Ces animaux n’ont pas simplement été tués par le feu. Ils ont été aussi piégés par une logique qui commande l’aménagement du territoire. Tout comme les inondations sont aussi le résultat de la bétonisation. Sans ces fils barbelés, sans ces clôtures, certains auraient sans doute pu échapper à l’incendie comme le font les humains qui se sont regroupés au bord des plages.
L’Australie possède par exemple la plus longue clôture construite au monde :
La barrière à dingos (en anglais : Dingo Fence). Elle est destinée à protéger les élevages de moutons des incursions des dingos, les chiens sauvages australiens.
Dès le 19e, il avait fallu construire de nombreuses clôtures pour protéger les parcelles des colons contre les animaux sauvages mais aussi contre les lapins qui avait été introduits par les Européens.
Et si ces animaux avaient pu, où se seraient-ils rendus ? Alors que leur monde part en fumée, il ne leur resterait que la ville et le béton. En Australie, le désert, c’est-à-dire la civilisation, avance à grands pas. Gageons que certains promoteurs immobiliers sauront en tirer parti.
On pourrait presque se réjouir que ce monde périsse par là où il a péché s’il n’y avait pas tant de malheurs et de vies humaines en jeu. La catastrophe australienne nous rappelle deux choses.
Si ce monde creuse sa propre tombe, il risque bien d’emporter avec lui tout ce qui devrait lui survivre. Et la catastrophe ne commence jamais au moment où elle devient visible aux yeux de tous.
Sources :